Michel-Ange, L’oeuvre dans le marbre

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Tout ce qu’un grand artiste peut concevoir, le marbre le renferme en son sein ; mais il n’y a qu’une main obéissante à la pensée qui puisse l’en faire éclore. De même tu recèles en toi, beauté fière et divine, et le mal que je fuis et le bien que je cherche ; mais l’effet de mes soins est contraire à mes vœux, et c’est ce qui me donne la mort. Je n’accuserai donc de mes maux ni le hasard, ni l’amour, ni tes rigueurs, ni tes dédains, ni le sort, ni tes charmes, Quand tu m’offres à la fois, dans ton cœur, la mort avec la vie, et que mon génie impuissant ne sait y puiser que la mort.

  Non ha l’ottimo artista alcun concetto,
Ch’ un marmo solo in se non circoscriva
Col suo soverchio, e solo a quello arriva
La man che obbedisce ail’ intelletto.
  Il mal ch’ io fuggo, e ‘l ben ch’ io mi prometto,
In te, donna leggiadra, altera, e diva,
Tal si nasconde, e, perch’ io più non viva,
Contraria ho l’arte al desiato effetto.
  Amor dunque non ha, nè tua beltate,
O fortuna, o durezza, o gran disdegno,
Del mio mal colpa, o mio destino, o sorte,
  Se dentro del tuo cor morte e pietate
Porti in un tempo, e che ‘l mio basso ingegno
Non sappia ardendo trame altro che morte.

Michel-Ange Buonarotti, Poèmes, sonnet I, traduction Aicard